TENDUA - Association pour la sauvegarde de la biodiversité

Newsletter n°4

DOSSIERS

Déforestation, huile de palme et huile de soja

Qu’est-ce que la déforestation ? La définition que l’on peut en trouver est « la destruction des forêts par abattage ou incendie afin de créer des espaces agricoles ou urbains, ou pour utiliser le bois pour le chauffage ou la construction ». Les conséquences en sont la disparition des écosystèmes, l’érosion des sols et la modification du climat.

Après avoir déforesté à-tout-va et sacrifié ses forêts, la Malaisie en est à sa 4e génération de palmiers et exporte désormais son « savoir faire » en Indonésie. Un palmier à huile commence à produire vers 4 ans jusqu’à 20 ans. L’ajout d’engrais permettra ensuite de poursuivre cette production encore une vingtaine d’années. Outre les engrais chimiques, le problème lié à cette monoculture est l’appauvrissement du sol et la pollution des eaux générés par la décomposition de la masse faramineuse de matières organiques de ces plantations.

L’ampleur de la déforestation est alarmante en Indonésie. En quelques chiffres :

  • Plus de 50 % de la forêt indonésienne a disparu depuis 50 ans,
  • 2 Millions d’ha sont détruits chaque année (un terrain de football toutes les 15 secondes),
  • 98 % de la forêt tropicale pourrait avoir disparu d’ici à 2022,
  • La raison principale en est le triplement des plantations de palmiers à huile d’ici là.

85 % de l’huile de palme consommée dans le monde (38 millions de tonnes en 2006 contre 21 millions en 2000) sont produites par de grands consortiums malaisiens, indonésiens ou sri-lankais qui la revendent à des groupes internationaux tels qu’Unilever dont la gamme de produits couvre les soins corporels, l’alimentation et l’entretien. La seule et unique raison de cet engouement pour l’huile de palme est son faible coût de production qui n’est, bien sûr, pas répercuté sur les consommateurs mais permet en revanche une marge encore plus importante. En effet, la tristement célèbre huile de palme se trouve dans pratiquement tous les produits du quotidien qu’il s’agisse du célèbre Nutella, de chocolats et autres biscuits sucrés et salés (marque Björg, Monoprix Bio notamment) , lessives, crèmes et savons (Dove), produits cosmétiques, pâtes à tarte, soupes, pains (Harry’s..), etc…

Un palmier à huile commence à produire vers 4 ans jusqu’à 20 ans, L’ajout d’engrais permettra ensuite de poursuivre cette production
Kalaweit

A ce titre, sachez qu’il n’existe pas de production « certifiée bio » et que le seul label valable à ce jour est le label clair « SANS huile de palme » indiqués sur certains produits (certains pains de chez Jacquet). L’appellation « huile végétale », recouvre en général de l’huile de palme ; s’il s’agissait d’une huile d’olive ou de colza, cela serait clairement indiqué. Même les produits « bio » ou « végétariens » peuvent contenir de l’huile de palme.

On prône désormais le « développement durable » pour la culture sur palmier à huile mais s’agit-il réellement d’un moyen pour arrêter la déforestation ? La France n’est pas en reste pour « aider » les Indonésiens.
http://www.cirad.fr/indonesie/prese...

Quels sont les intérêts sous-jacents à ce développement dont la durabilité ne semble n’être que la pérennisation d’intérêts déjà installés ? Il est question également de gérer durablement les exploitations forestières. C’est en tout cas l’approche des pays riches qui veulent exporter leurs connaissances en la matière. Mais à y regarder de plus près, l’exploitation des ressources forestières du Sud est encouragée par les besoins en bois de construction et en papier au Nord. S’agit-il de se donner bonne conscience ou est-ce désormais la seule opportunité de ne pas tout détruire ?...

Pendant que l’on « cherche » des solutions pour « faire durer les ressources », la forêt disparaît et les écosystèmes qui y vivent aussi : les rivières sont polluées, la faune terrestre et aquatique meure…
En Amérique du Sud, 16% de la forêt amazonienne a été convertie pour la culture du soja. Selon les analyses de Lester Brown [1], en 2005, sur 220 millions de tonnes de soja produites dans le monde entier, 15 millions de tonnes sont consommées « directement » par les humains (tofu, lait de soja, yaourts, bougies…), 144 millions de tonnes pour nourrir les animaux d’élevage, notamment les vaches laitières, porcs et volailles : le tourteau [2] de soja est très riche en protéines (En France, le soja représente 70% des tourteaux consommés). Cette culture est en pleine expansion car elle favorise, à faible coût, une croissance rapide des animaux. Les 2 premiers pays producteurs et exportateurs sont le Brésil et l’Argentine. Sans parler de la problématique de la culture de soja OGM… Encore 33 millions de tonnes sont produites pour l’huile dont 7% servent d’agro-carburant. Le coût environnemental et humain est très lourd : en Amérique du Sud, en 100 ans, plus de 90 tribus dépendantes de la forêt ont disparu avec leur langue, leur savoir et leur culture.

Entre 1995 et 2005, en 15 ans, la Terre a perdu 3% de sa surface forestière. Les forêts primaires [3] tropicales – dont plus des 2/3 sont au Brésil (Amazonie), en République Démocratique du Congo et en Indonésie – jouent pourtant un rôle essentiel dans le climat et contre les gaz à effet de serre, la déforestation contribuant elle aux gaz à effet de serre. La forêt absorbe la lumière, là où le sol nu renvoie l’énergie du soleil vers l’atmosphère. La température ambiante moyenne peut augmenter localement de 10°C après une déforestation en zone tropicale. Ce réchauffement local modifie la pression atmosphérique qui influe sur le déplacement des masses d’air et donc des tempêtes. Les cycles pluviométriques sont modifiés à l’échelle mondiale, provoquant des sécheresses et inondations anormales.

Concrètement il ne s’agit pas de baisser les bras et se décourager, mais de prendre conscience de ce que l’on consomme et de diminuer sa consommation de produits contenant de l’huile de palme ou de soja. Lisez les étiquettes, préférez le beurre à la margarine, sélectionnez vos marques, choisissez vos cosmétiques, et le plus important encore, parlez-en autour de vous : plus de consommateurs seront conscients de la situation, plus les entreprises devront prendre en compte leurs avis et les gouvernements seront poussés à prendre position. Il n’est pas forcément trop tard : « quand on croit, on peut »…


[1Lester Russell Brown (né en 1934) est un agroéconomiste et analyste environnemental américain. Pionnier des recherches sur le développement durable, il a été l’un des premiers, et des plus prolifiques, à écrire sur les problèmes liés à l’écologie.

[2Les tourteaux sont les résidus solides obtenus après extraction de l’huile des graines ou des fruits oléagineux. Ce sont les co-produits de la trituration, c’est-à-dire l’industrie de fabrication de l’huile.

[3La forêt primaire est considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’intervention humaine y ayant laissé des séquelles importantes ou observables.

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